© Office du Tourisme du Costa Rica
Le contexte touristique au Costa Rica
Le tourisme au Costa Rica fait partie intégrante de l’économie du pays : en effet, il génère de l’emploi pour plus de 200 000 personnes et représente 6,3% du PIB costaricien en 2016[1]. Cependant, cela a plusieurs conséquences négatives à la fois sur l’environnement et les habitants.
De ce fait, le Treizième Rapport National mentionne que la croissance exponentielle des infrastructures touristiques costariciennes est l’une des principales préoccupations de l’agenda politique national. En effet, le tourisme, même lorsqu’il est vendu par des stratégies marketing comme de « l’écotourisme », a des impacts sur l’environnement. Les terres, qui étaient en majorité tenues par des Costariciens (appelés Ticos), ont commencé à être vendues à des étrangers, principalement à des entreprises dont l’objectif est la construction d’hôtels ou de projets d’habitations. En construisant des chemins qui fragmentent les forêts, ces entreprises mettent en péril les espèces de faune et de flore, et produisent également une certaine gentrification, puisqu’elles obligent les habitants à déménager à cause de la montée des prix. La mauvaise gestion dans l’approvisionnement en eau et la pollution des zones alentour impactent les habitants locaux. Selon ce même rapport, le développement de l’activité touristique a généré des conflits sur la disponibilité des ressources en eau entre les habitants costariciens et les gérants des complexes touristiques.
Parfois, ce type de tourisme, appelé écotourisme, se développe dans des zones protégées. Malgré le fait que ces dernières sont aménagées en « îles vertes », c’est-à-dire en lieux touristiques donnant lieu à des activités de sensibilisation sur la protection de l’environnement, ou encore avec des installations plus « ecofriendly » comme des conteneurs pour recycler les déchets par exemple, on remarque des impacts sur la population locale. Le Parc National Manuel Antonio (Côte Pacifique, Zone Sud) est un bon exemple : ce parc fut à l’origine peuplé par des communautés indigènes et elles furent obligées de se déplacer avec l’arrivée des colons espagnols[2]. Ce parc fut finalement converti par l’État costaricien dans les années 1970, en un lieu pour l’écotourisme. Seuls les touristes étrangers ont accès au parc, et la population locale se voit souvent victime d’un manque d’infrastructures, comme le soulignent divers rapports sur le sujet.
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Le témoignage d’un Costaricien
Adrien Daniel Flores Rodriguez, un Tico de 21 ans qui a grandi sur la côte Pacifique Nord du pays, dans la région de Guanacaste, nous confie : « Il y a deux types de touristes au Costa Rica : les “backpackers” [touristes “sac à dos”] d’une part, et ceux qui sont riches et qui passent leur séjour dans des hôtels [3]. »
Par cette distinction, il différencie et classe en différentes catégories les touristes étrangers qui viennent au Costa Rica. Cependant, il affirme que tous ont des impacts sur le pays. En effet, les « backpackers » participent aussi à la transformation du paysage, ainsi qu’à la déformation de la structure du pays. Les zones de tourisme du pays comme les cascades, les plages ou encore ses parcs nationaux doivent être adaptées pour les recevoir.
Aussi, nous précise Adrien, « les riches achètent la terre »: petit à petit, des bouts de territoire costaricien sont privatisés, ce qui limite l’accès des Costariciens aux espaces. Les luxueux hôtels transforment et dégradent ce paysage si particulier et propre au Costa Rica. Selon lui, la ville de Dominical (région « Zona Sur »), est un autre bon exemple de ce qui est devenu une « surf town », mystique et américanisée, avec de nombreux restaurants, écoles de surfs, marchés (dans lesquels les transactions peuvent d’ailleurs se faire en Bitcoin), ou encore de petits cafés dans lesquels il est possible de prendre des « brunchs à l’Américaine », de nombreux vans aménagés dans lesquels habitent celles et ceux qui vivent sur la route…
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Il est cependant important de nuancer les arguments ci-dessus, puisqu’il existe certains bénéfices économiques, sociaux et culturels du tourisme. On remarque qu’y compris la population indigène expérimente ses effets positifs : de nombreux « tours » de champs de cacao et café sont organisés, des emplois sont créés, et cela peut faciliter leur quotidien.
[1] Résultats du Compte Satellite du Tourisme établi par la Banque Centrale du Costa Rica (BBCR) en collaboration avec l’Institut Costaricain du Tourisme (ICT)
[2] Solórzano Fonseca, Juan. 1992. « Conquête, Colonisation Et Résistance Indigène au Costa Rica». Revista De Historia, nº 25 (janvier), 191-205.
[3] Interview par Zoom avec Adrien Daniel Flores Rodriguez, réalisée le 24 novembre 2022
Maëlle Ramus et Jade Taillard
Étudiantes à Sciences Po Grenoble
Sous la direction de Sonia Berrakama