©Juan César Astudillo

Le peuple Mapuche est l’un des peuples originels d’Amérique du Sud qui habitait la région de la Patagonie argentine et chilienne avant l’arrivée des Espagnols.

Aujourd’hui, le peuple Mapuche conserve sa langue, le mapudungun, et ses coutumes ancestrales, notamment dans les zones rurales. Il s’agit d’un peuple bilingue et biculturel qui évolue vers l’interculturalisme. Les Mapuche conservent et font valoir leur savoir ancestraux au moyen d’une oralité reliée par différentes pratiques discursives, dont l’ülkantun ou chant mapuche[I]

Lülkantun est une création artistique propre à la culture mapuche. Le premier ülkantun a été enregistré au Chili vers 1629 par Francisco Núñez de Pineda y Bascuñán. Le narrateur raconte comment le cacique Quilalebo lui a fait ses adieux avec une chanson accompagnée de danses et d’instruments.

L’ülkantun est un type spécifique de discours chanté en langue mapuche. Il est créé individuellement sous forme monodique et présente un caractère poético-musical, abordant une grande variété de thèmes. Sa diffusion dans un cadre communautaire le rend anonyme et sociale. La brièveté est son trait le plus caractéristique, bien qu’il existe des textes très longs, comme ceux liés à des thèmes épiques.

Selon la bibliographie consultée [II], les thèmes des ülkantun sont variés et peuvent être classés en sept thématiques qui se répètent. Le lamngen ülkantun ou chant d’amour, le machi ül ou chant de guérison, le ngünülün ou chant élégiaque, le pichiche ül ou berceuse, le weichapegüm ül ou chant épique, le llamekan ou chant social, et le ñuwin ül ou chant de battage.

En général, le chant est accompagné par le kultrum, un instrument de percussion fabriqué en peau de mouton. Cependant, les élégies sont accompagnées d’un autre petit instrument métallique, le trompe, trompetupeyün ül. Un autre instrument qui peut accompagner les chants est le kinkülkawe, un arc à résonateur vocal fait de deux morceaux de côte de poulain.

À titre d’exemple, nous partageons deux transcriptions réalisées en 1963 à San Martín de Los Ande et à Neuquén par des chercheurs spécialisés dans la culture mapuche dont Berta Koessler-Ilg.

Les chants épiques ou weichapegüm ül évoquent l’occupation des terres et les luttes contre les Chiliens et les Argentins, le winka, et autour du malón.

Les chants du peuple Mapuche : savoir ancestral et oralité

XIII

Uenankun elkantun

Peñi anai peñi müleinga mülai mapu gnañitemum, anai peñi. Ragnün küme ke kullin meut´emum mürkei eneu gnañi küme ke femgñen, anai peñi. Fanten meu gna uesa che reke ngamiautun, anai peñi.

Frère, frère- ami : voilà, voilà le pays où j’ai grandi, frère -ami. Au milieu des meilleurs animaux, j’ai été élevé par mes chers parents, frère-ami. Mais maintenant je marche comme un misérable, frère-ami.

Les chansons de guérison ou machi ül sont les chansons chantées par la principale figure féminine de la société mapuche : la machi. Dans le machitún ou rituel de guérison, ils chantent, prient et dansent accompagnés par le kultrum et la pifilka.

VIII
¿,,Monéan “pilaimi te?
¿,,Monéan na” pilaimi te?
Fëreneqeimeu Ngënechen.
Akuleimi mariepu reniñwenu llaweñ mai,
Tami monean,
Tami fëreneeteu rangiñwenu Ngënechen.
Elúyeaimeu mariepu llawen´mai.

N’as-tu pas dit : « Je veux guérir » ?
N’as- tu pas dit : « Je veux guérir » ?
Dieu a eu pitié de toi.
Je t’apporte douze remèdes des hauts cieux,
Pour que tu guérisses,
Car les hauts cieux ont eu pitié de toi.
Dieu a eu pitié de toi.
Il te donnera douze remèdes.

Les travaux récents d’Herminia Navarro Hartmann et dOlga Huenaihuen sur la poésie mapuche confirment la validité d’une langue, le mapundungun, qui évolue vers des registres inconnus à ses origines, comme l’écriture.

[I] La diffusion de la chanson mapuche à l’heure actuelle dans la voix d’Anahí Rayen Mariluan : https://www.youtube.com/watch?v=9tlF2BqMQxM&t=4s

[II] FERNÁNDEZ, César et NAVARRO, Herminia, Ulkantun : cancionero mapuche. Ed. Carminalucis, Buenos Aires, 2021.

María Beatriz Vitarelli

María Beatriz Vitarelli

Autrice

Traduction : Rafael Tobar