© Commons – Vue aérienne du barrage d’Itaipu à la frontière entre le Brésil et le Paraguay
BOURTEAU Mahé, étudiant de troisième année à Sciences Po Grenoble, RIBOT Clément, étudiant de troisième année à Sciences Po Grenoble et PERSONA Anthony, étudiant de troisième année à Sciences Po Grenoble
Sous la direction de BERRAKAMA Sonia, professeure agrégée d’espagnol à Sciences Po Grenoble
En tant que région particulièrement exposée au changement climatique, l’Amérique latine est de fait considérée comme un acteur stratégique de la transition énergétique. Les engagements de ses pays se retrouvent principalement dans l’Accord de Paris de 2015, accord ayant mis l’accent sur le rôle prépondérant que peut avoir l’Amérique Latine dans l’implémentation des énergies renouvelables.
Le Brésil : leader latino-américain des énergies durables
De plus en plus, le Brésil s’impose comme la première puissance économique d’Amérique Latine, jouant un rôle essentiel dans le domaine des énergies renouvelables avec ses 27 GW d’énergie solaire et éolienne en fonctionnement. Cette capacité devrait même atteindre 217 GW d’ici à 2030.
Une variété de facteurs structurels peut expliquer l’explosion récente du secteur éolien brésilien depuis 2012, des avancées technologiques aux politiques de financement avantageuses, en passant par les enchères compétitives sur le marché. Grâce à tous ces éléments, le Brésil a pu devenir le leader régional de la production et du développement de l’énergie éolienne. La même année, la vente de la production d’électricité solaire des groupes privés a été autorisée sur le marché brésilien. Ainsi, ces différents éléments, combinés à des outils politiques encourageants, tels que les accords internationaux des COP, ont été l’occasion pour le Brésil de développer son potentiel en matière d’énergies renouvelables.
Dans l’ensemble, le Brésil se distingue par son mix énergétique prometteur, avec plus de 80 % de ses besoins en électricité couverts par les énergies renouvelables permettant au pays de dépasser ainsi la moyenne mondiale de 15 %. En outre, le Brésil est le sixième producteur mondial d’énergie éolienne, représentant 14 % de la production nationale totale d’énergie. En terme de géographie des installations, près de 80 % des parcs éoliens se trouvent dans le nord-est du Brésil (État du Rio Grande do Norte), notamment car il s’agit d’une région où les vents sont constants, ce qui permet d’obtenir des facteurs de charge allant d’une moyenne de 40 % à des valeurs optimales de 60 % (plus élevées que la moyenne mondiale de 34%).
© Agência ABEEólica – Carte de la répartition des parcs éoliens sur l’ensemble du territoire brésilien en 2017
La transition énergétique du Brésil : par quels moyens et à quel prix ? À la recherche d’un équilibre entre le bien-être environnemental et humain.
Le Brésil, jouant un rôle moteur dans le domaine des énergies renouvelables, est également de fait confronté à des défis liés à la construction de nouvelles infrastructures de production. Plus précisément, il existe des conflits avec certains habitants des zones où ces nouvelles installations sont construites. L’absence de réglementation sur la proximité entre les éoliennes et les habitations est l’une des causes fondamentales de ces conflits. Cette absence conduit à ces tensions car elle se traduit par des nuisances sonores intenses qui affectent la vie des habitants et pose des risques réels pour ceux qui vivent à proximité des installations, comme la pollution par les marées noires qui affectent l’eau et les cultures.
Outre les impacts sur la population, la transition énergétique brésilienne a également généré des tensions avec d’autres acteurs. En effet, les ONG jouent un rôle crucial dans la défense de politiques environnementales durables et dans la sensibilisation du public à l’importance des énergies propres. De leur côté aussi, les groupes ethniques et sociaux expriment des préoccupations spécifiques comme l’illustre la construction du monumental barrage de Belo Monte. Dans la contestation de celle-ci se retrouvaient les groupes indigènes craignant que cette construction n’affecte négativement leur mode de vie ancestral, et les écologistes mettant en garde contre les risques de dommages irréversibles à l’écosystème. Dans certains cas, ces conflits peuvent générer à de vraies violences entre les différents acteurs intéressés, comme ce fut le cas à Casa Nova en 2010.
© Cristian Lourenço – Parc éolien dans l’Etat brésilien du Ceará
Pour finir, l’action politique influence grandement sur les politiques énergétiques brésiliennes. En effet, lorsque Lula était présent dans les années 2010, il avait érigé le développement durable au rang de priorité politique de son mandat, ce qui avait permis la montée des projets énergétiques comme évoqué précédemment. Cependant, la dynamique a changé lorsque Jair Bolsonaro est arrivé au pouvoir en 2019. Impatient d’enclencher un modèle de développement stimulant les projets agricoles et miniers ambitieux, il ôte au Ministère de l’Environnement ses prérogatives permettant son influence, et cela dans la foulée de son élection.
Pendant son mandat, le développement des énergies renouvelables est mitigé. D’un côté Bolsonaro a été critiqué en grande partie pour ses politiques environnementales, en particulier celles en rapport avec la déforestation de l’Amazonie (augmentation de 75% de la déforestation amazonienne en 2019 en comparaison avec l’année antérieur) et l’essor de l’extraction minière dans des zones écologiquement sensibles. Cependant, sous le même mandat, quelques projets d’énergies renouvelables ont continué à être développés, bien qu’il y ait eu des signes de ralentissement ou de réduction des investissements dans les énergies renouvelables, en partie à cause de politiques gouvernementales moins favorables à ces secteurs. Un exemple notoire est la préférence du gouvernement de Bolsonaro d’attribuer des subventions au développement des énergies fossiles, plutôt que de les attribuer aux projets d’énergies renouvelables.
© Brenda Sangi Arruda – Installation de panneaux solaires au Brésil
BOURTEAU Mahé, RIBOT Clément, ANTHONY Persona
Etudiants de troisième année à Sciences Po Grenoble