Crédits : Léandro Pereira

La Macumba et le Candomblé, tous deux issus des religions venues d’Afrique avec les esclaves il y a plus de 400 ans, ont fondé la culture immatérielle et la société du Brésil.

Grâce au commissaire d’exposition François Pannier, ICI – Institut Culturel International – sont présentées à Venise des expositions sur l’art ethnographique de l’Himalaya, invitant le public à découvrir certaines pratiques, croyances et mythes de l’Asie.

En 2020, en rassemblant artistes et spécialistes, nous avons décidé de démystifier les croyances ou religions afro-descendantes. À Cuba, nous avions découvert la Santeria. Alfie Nze, artiste nigérian vivant à Milan, nous a donné une vision en miroir des deux cultures.

Pour aller à la découverte des religions et des croyances qui, il y a plus de 400 ans, ont fondé la culture immatérielle et la société du Brésil, il nous fallait d’abord nous y rendre.

Les croyances et religions d’Afrique apportées sur le continent américain par les esclaves ont été maltraitées par le colonisateur chrétien. Certaines ont adopté les croyances et religions des habitants indigènes.

“Ancien et Nouveau. Le Candomblé est une religion très ancienne, avec beaucoup d’adeptes dans tout le pays. Beaucoup de personnes ne savent cependant toujours pas que le Candomblé n’est pas une secte et qu’il est indépendant des autres religions, telles que le spiritisme, le catholicisme ou même le Umbanda. Le Candomblé est une religion avec sa propre base philosophique, ses mystères, ses croyances et ses rituels spécifiques.”(2)

Au delà d’une spiritualité, le Candomblé a contribué à structurer la société brésilienne, à l’émancipation des esclaves et à leurs “empowerment” comme nous dirions aujourd’hui.

DESCUBRIENDO EL CANDOMBLÉ EN RIO DE JANEIRO - BRASIL

Crédits : Léandro Pereira

Venu en observateur, sans avoir ni étudié ni lu 

Leandro Pereira, Pai de Santo, m’a convié à assister sans autre indication que celle d’assister en observateur à différents rituels, à différents moments de la vie spirituelle et quotidienne à la fois chez lui et dans le Terreiro qu’il fréquente. Le nom du lieu dédié à la pratique religieuse renvoie directement à l’histoire coloniale et à l’esclavage.(3)

Ma surprise fut grande d’y entendre le son “ohm” (4), et d’observer des gestes qui rappelaient les pratiques asiatiques du bouddhisme. Ces gestes, ces sons, ces chants faisaient appel aux mêmes énergies pour entrer en méditation et en dialogue. Ici, cette énergie est appelée Axé (5).

Autre surprise pour moi, l’importance de la cuisine, du nettoyage, de l’organisation, des bains tant pour les rituels que dans la vie quotidienne.

En France, comme l’écrit Nathalie George, “La table est capitale pour l’équilibre de la relation des hommes entre eux, et la préparation des mets ne fait qu’ajouter à la qualité de ce moment. Bien manger satisfait les papilles, insuffle à l’organisme tout ce dont il a besoin, assure un moral d’acier et permet de combattre l’adversité moralement et physiquement. Donc de sourire à la vie.”(6) Ce rituel français est classé patrimoine immatériel par l’Unesco.

Il en est de même ici. “Les religions africaines dans le nouveau monde ont agi, dès le début, comme de véritables centres communautaires qui se soucient de l’équilibre psycho-émotionnel de leurs membres, à travers une médecine naturelle millénaire, prenant soin de la santé de ses membres.” (2)

Leandro Pereira indique : “le Candomblé tourne autour de la nourriture, c’est comme cela que nous invitons la force de l’orixá (7) à rester avec nous, parmi nous.”

J’ai pu constater combien la structure de la communauté, le soutien entre ses différents membres étaient forts, que ce soit dans le cadre religieux ou en dehors.

  A LA DÉCOUVERTE DU CANDOMBLÉ À RIO DE JANEIRO - BRÉSIL

Crédits : Léandro Pereira

Au-delà des rituels ou de la macumba qui font fantasmer ou effraient les occidentaux

Dans le Candomblé, on trouve un modèle de spiritualité qui est proche de ceux d’Asie. D’une part pour ses liens avec la nature et les énergies. Et d’autre part pour leur modèle de société bienveillant né du déracinement de ceux qui ont été arrachés à leur terre natale et contraints à l’esclavage.

Pour El Café Latino, j’ai proposé à Leandro Pereira d’aborder ces thèmes dans une série d’articles : Axé, la structure sociétale et communautaire du Candomblé, les orixás, ainsi que l’art divinatoire du Jogo de Buzios.

A propos de Leandro Pereira

Léandro PEREIRA est Pai de Santo dans la religion Candomblé. Après avoir été séminariste catholique,sa spiritualité s’est orientée et épanouie depuis 20 ans vers cette religion afro-descendante du Brésil. Il y a été initié par Mãe Maria de Oxossi en avril 2000. Vingt ans au cours desquels il a reçu les enseignements nécessaires pour manipuler l’Axé dans l’intérêt de sa propre évolution et dans celui des personnes qui demandent conseil et aide aux Orixás pour parvenir à une vie plus harmonieuse, équilibrée et heureuse.

Il bénéficie grâce à ce parcours d’une double vision culturelle (Europe et Brésil). Il a ainsi été un guide parfait lors de notre séjour. Dans ce cadre spirituel, il pratique aussi différents arts de divination comme le jogo de búzios. Leandro exerce parallèlement une activité professionnelle. Il accepte le rôle de Pai de Santo par dévouement pour le bien de sa communauté.

Notes :
1. Ce voyage a été maintenu en 2020, malgré la pandémie, dès que le Brésil a rouvert ses frontières.
2.     extrait de Iniciação ao Candomblé – 4 edicao – Zeca Ligiero – Edition Nova Era
3. comme Barracao (lieu de rassemblement). C’était le nom des bâtiments où logeaient les esclaves dans les plantations de café ou de sucre)  Voir article Los Caminos del Café par Yaumara Lopez – N° de Café Latino
4. son sacré du bouddhisme qui se réfère généralement au son de l’univers
5.prononcé Aché, mot d’origine Yoruba
6. dans La Cuisine du 6e étage – Editions Herodios
7. prononcé oricha 

Olivier PERPOINT

Olivier PERPOINT

Auteur de l'article